Le rejointoiement d’un mur en pierre est une opération essentielle pour préserver la beauté et la longévité de vos maçonneries anciennes. Qu’il s’agisse d’un mur extérieur, d’une façade ou d’une construction intérieure, cette technique permet de restaurer l’étanchéité et l’esthétique de vos ouvrages en pierre. Dans ce guide complet, je vous dévoile toutes les techniques de jointoiement pierre et les méthodes éprouvées pour réussir cette opération délicate, même sans expérience préalable.
Avec plus de 25 ans d’expérience dans la restauration de bâtisses provençales, j’ai pu constater que le rejointoiement est souvent négligé alors qu’il constitue la première ligne de défense contre les infiltrations et l’usure du temps. Un mortier pour mur en pierre bien choisi et correctement appliqué peut prolonger la durée de vie de votre maçonnerie de plusieurs décennies.
Pourquoi et quand rejoindre un mur en pierre ?
Avant de vous lancer dans la réparation des joints de pierre, il est essentiel de comprendre l’importance de cette opération et d’identifier le moment opportun pour l’entreprendre.
Les signes qui indiquent un besoin de rejointoiement
Votre mur en pierre nécessite probablement un rejointoiement si vous observez :
- Des joints qui s’effritent au toucher ou qui se creusent
- Des fissures visibles dans le mortier existant
- Des traces d’humidité sur le mur en pierre (taches, moisissures)
- Des pierres qui bougent légèrement
- L’absence complète de mortier par endroits (joints creux)
La règle d’or : si vous pouvez enfoncer la pointe d’un couteau de plus de 1 cm dans le joint sans résistance, il est temps d’intervenir.
Les bénéfices d’un bon rejointoiement
Un rejointoiement mur pierre correctement réalisé offre de nombreux avantages :
- Protection contre les infiltrations d’eau et l’humidité
- Renforcement de la stabilité structurelle du mur
- Amélioration de l’isolation thermique et acoustique
- Valorisation esthétique et patrimoniale de votre bâtisse
- Prévention des dégradations liées au gel/dégel
Préparation du mur avant rejointoiement
La réussite d’un bon rejointoiement mur pierre repose en grande partie sur la qualité de la préparation. Cette étape, souvent sous-estimée, est pourtant déterminante.
Diagnostic et évaluation de l’état du mur
Avant toute intervention, réalisez un examen minutieux :
- Identifiez le type de pierre (calcaire, grès, granit) pour choisir un mortier compatible
- Évaluez la profondeur de dégradation des joints existants
- Repérez les zones particulièrement endommagées nécessitant une attention spéciale
- Vérifiez la présence d’humidité dans le mur en pierre et identifiez-en l’origine
Un bon diagnostic vous permettra d’adapter votre approche et d’anticiper les difficultés potentielles.
Nettoyage et préparation des joints
Cette étape cruciale conditionne l’adhérence du nouveau mortier :
- Équipez-vous correctement : lunettes de protection, gants, masque anti-poussière
- Dégarnissez les anciens joints à l’aide d’un burin et d’une massette, ou d’une meuleuse avec disque adapté pour les joints très durs
- Creusez sur une profondeur de 2 à 3 cm minimum pour assurer une bonne accroche
- Brossez énergiquement les cavités avec une brosse métallique pour éliminer les particules friables
- Dépoussiérez soigneusement à l’aide d’une brosse sèche ou d’un aspirateur
Pour les murs anciens ayant été rejointoyés au ciment, prenez le temps de retirer complètement ces joints incompatibles, même si l’opération est laborieuse. Le ciment emprisonne l’humidité et accélère la dégradation des pierres.
Humidification du support
Avant d’appliquer le nouveau mortier, humidifiez légèrement le mur :
- Utilisez un pulvérisateur à eau pour contrôler la quantité
- Le support doit être humide mais non ruisselant
- Cette humidification favorise l’adhérence et évite que le support n’absorbe trop rapidement l’eau du mortier
En été ou par temps chaud, cette étape est particulièrement importante et peut nécessiter plusieurs passages.
Choix du mortier adapté aux murs en pierre
La sélection du mortier pour mur en pierre est déterminante pour la durabilité et la compatibilité avec votre maçonnerie existante.
Les différents types de mortiers et leurs applications
Plusieurs options s’offrent à vous, chacune avec ses spécificités :
- Mortier de chaux pure : idéal pour les bâtisses anciennes, il laisse respirer le mur et s’adapte aux mouvements de la structure
- Mortier bâtard (chaux + ciment) : offre un bon compromis entre souplesse et résistance mécanique, adapté aux constructions semi-récentes
- Mortiers prêts à l’emploi : solution pratique mais à choisir avec discernement selon la compatibilité avec votre type de pierre
Pour les murs en pierre traditionnels, privilégiez toujours un mortier à base de chaux plutôt qu’un mortier de ciment pur, trop rigide et imperméable. Vous pouvez choisir entre chaux aérienne et hydraulique selon vos besoins spécifiques.
Le choix de la chaux : aérienne ou hydraulique ?
La chaux est le matériau de prédilection pour le rejointoiement de mur en pierre, mais il existe différents types :
- Chaux aérienne (CL) : très souple et perméable, idéale pour les finitions et les pierres très tendres, mais prise lente
- Chaux hydraulique naturelle (NHL) : disponible en différentes résistances (NHL 2, 3.5 ou 5), elle offre un bon équilibre entre perméabilité et solidité
Pour un usage général en rejointoiement, la NHL 3.5 constitue souvent le meilleur compromis. Pour les zones très exposées aux intempéries ou les bas de murs, préférez la NHL 5 plus résistante.
Préparation du mortier de chaux pour rejointoiement
Pour réaliser un mortier à la chaux adapté au rejointoiement :
- Dosage recommandé : 1 volume de chaux pour 2,5 à 3 volumes de sable
- Choisissez un sable de qualité, de préférence lavé et de granulométrie adaptée à l’épaisseur de vos joints (0/4 mm pour les joints courants)
- Mélangez d’abord les composants secs (chaux et sable) avant d’ajouter l’eau progressivement
- Ajoutez l’eau petit à petit jusqu’à obtenir une consistance souple mais qui tient sur la truelle
- Pour un mortier coloré, incorporez des pigments naturels (ocres, terres) à hauteur de 5 à 10% maximum du poids de la chaux
Un bon mortier doit avoir la consistance d’une « pommade épaisse » et tenir sur une truelle retournée sans tomber.
Techniques de rejointoiement pour murs en pierre
Maîtriser les techniques de jointoiement pierre est essentiel pour obtenir un résultat à la fois esthétique et durable.
Les outils nécessaires pour le rejointoiement
Pour réaliser un travail de qualité, équipez-vous des outils pour rejoindre la pierre suivants :
- Truelle de maçon classique pour la préparation du mortier
- Truelle langue de chat de différentes tailles pour l’application dans les joints
- Fer à joint pour le profilage (concave, plat ou en V selon le rendu souhaité)
- Brosse à joint pour le nettoyage et la finition
- Pulvérisateur à eau pour humidifier le support et le mortier frais
- Seau ou auge pour la préparation du mortier
Pour les grandes surfaces, un pistolet à joint peut faciliter et accélérer considérablement le travail.
Application du mortier dans les joints
La technique d’application est déterminante pour la qualité et la durabilité du rejointoiement :
- Commencez par les joints verticaux, puis passez aux horizontaux
- Remplissez les joints en pressant fermement le mortier avec la truelle langue de chat pour éviter les poches d’air
- Pour les joints profonds, procédez en plusieurs passes (couches de 1 cm maximum) en laissant raffermir entre chaque application
- Assurez-vous que le mortier adhère bien aux flancs des pierres et non seulement en surface
- Travaillez par sections de 1 à 2 m² pour maintenir un contrôle optimal sur la qualité
Une astuce de professionnel : pour les joints très étroits, utilisez une poche à douille improvisée avec un sac plastique dont vous aurez coupé un coin.
Les différents types de finitions de joints
Le choix de la finition influence grandement l’aspect final de votre mur :
- Joint brossé : aspect rustique obtenu en brossant légèrement le mortier encore frais
- Joint lissé : finition soignée réalisée à l’aide du fer à joint ou de la truelle
- Joint gratté : texture légèrement rugueuse créée en grattant superficiellement le mortier semi-sec
- Joint en creux : joint légèrement en retrait par rapport à la surface des pierres, mettant celles-ci en valeur
- Joint affleurant : mortier au même niveau que les pierres, pour un aspect plus contemporain
Le choix de la finition doit être cohérent avec le style architectural de votre bâtisse et l’effet esthétique recherché.
Rejointoiement à la chaux : méthodes et précautions
Le rejointoiement à la chaux est la méthode traditionnelle par excellence, particulièrement adaptée aux constructions anciennes.
Avantages du rejointoiement à la chaux
Opter pour un mortier à la chaux présente de nombreux bénéfices :
- Perméabilité à la vapeur d’eau, permettant au mur de « respirer »
- Souplesse qui s’adapte aux mouvements naturels de la maçonnerie
- Aspect esthétique authentique et patiné avec le temps
- Résistance aux cycles gel/dégel grâce à sa structure microporeuse
- Propriétés naturellement fongicides et bactéricides
La chaux est le matériau historiquement utilisé pour les joints de pierre, assurant ainsi une parfaite compatibilité avec les matériaux d’origine.
Précautions spécifiques pour le travail à la chaux
Travailler avec la chaux demande quelques précautions particulières :
- Protection individuelle renforcée : la chaux est caustique, portez des gants étanches, des lunettes et des vêtements couvrants
- Conditions climatiques : évitez les températures extrêmes (inférieures à 5°C ou supérieures à 30°C)
- Temps de séchage plus long : la carbonatation de la chaux peut prendre plusieurs semaines, soyez patient
- Protection contre le séchage rapide : humidifiez régulièrement les joints frais pendant plusieurs jours
Pour optimiser la prise de la chaux, vous pouvez appliquer un enduit chaux sur murs extérieurs en suivant des techniques similaires.
Cure et protection du mortier de chaux
La phase de cure est cruciale pour un mortier à la chaux :
- Protégez le mortier frais du soleil direct et du vent avec des bâches ou des toiles de jute humides
- Brumisez régulièrement les joints pendant au moins 3 à 7 jours selon les conditions climatiques
- En période chaude, répétez l’humidification jusqu’à 3 fois par jour
- Évitez tout choc ou vibration à proximité du mur pendant la prise initiale
Contrairement au ciment qui prend rapidement, la chaux développe sa résistance progressivement sur plusieurs mois, voire années, gagnant en durabilité avec le temps.
Erreurs à éviter lors du rejointoiement
Certaines erreurs de rejointoiement peuvent compromettre la durabilité et l’esthétique de votre ouvrage.
Les erreurs de préparation courantes
Évitez ces pièges fréquents lors de la phase préparatoire :
- Négliger le dégarnissage complet des anciens joints friables
- Omettre le nettoyage approfondi des cavités
- Travailler sur un support trop sec ou au contraire détrempé
- Ne pas protéger les abords du mur (projections de mortier)
- Sous-estimer le temps nécessaire (comptez environ 2 à 3 m² par jour pour un travail soigné)
Une préparation bâclée est la cause principale d’un rejointoiement qui ne tient pas dans le temps.
Les erreurs de choix de matériaux
Le choix des matériaux est souvent source d’erreurs de rejointoiement :
- Utiliser du ciment pur sur des murs anciens (incompatibilité physique et esthétique)
- Opter pour un mortier trop résistant par rapport à la pierre (risque d’endommager la pierre)
- Négliger la compatibilité du mortier avec la pierre existante
- Choisir un sable trop fin ou mal lavé (risque de retrait et de fissuration)
- Doser incorrectement le mélange (trop ou pas assez de liant)
Le principe fondamental : le mortier doit toujours être plus tendre que la pierre pour jouer son rôle de « fusible » en cas de mouvements ou de contraintes.
Les erreurs d’application et de finition
Lors de l’application, évitez ces erreurs courantes :
- Appliquer une couche trop épaisse en une seule fois (risque de fissuration)
- Travailler trop rapidement sans serrer correctement le mortier
- Lisser prématurément avant que le mortier n’ait commencé à « tirer »
- Négliger l’humidification pendant la phase de cure
- Réaliser les joints par temps de gel ou de forte chaleur
Une application minutieuse et patiente est la clé d’un rejointoiement réussi et durable.
Entretien et durabilité des joints en pierre
Un rejointoiement mur pierre bien réalisé peut durer plusieurs décennies, mais un entretien régulier reste nécessaire.
Surveillance et entretien régulier
Pour préserver la qualité de vos joints :
- Inspectez visuellement vos joints au moins une fois par an, idéalement au printemps
- Portez une attention particulière aux zones exposées aux intempéries (bas de murs, angles, couronnements)
- Nettoyez délicatement les joints à l’aide d’une brosse souple et d’eau claire
- Éliminez rapidement toute végétation parasite (mousses, lichens) qui s’installerait dans les joints
Une surveillance régulière permet d’intervenir ponctuellement avant que les dégradations ne s’étendent.
Réparations ponctuelles des joints endommagés
Pour les interventions localisées :
- Dégarnissez soigneusement la zone endommagée jusqu’à retrouver un support sain
- Nettoyez et humidifiez comme pour un rejointoiement complet
- Préparez un mortier identique à celui utilisé initialement (même composition, même dosage)
- Appliquez en veillant à bien raccorder avec les joints existants
- Assurez la même finition pour une intégration harmonieuse
Pour les réparations ponctuelles, vous pouvez consulter notre guide pour construire un mur en pierre qui contient des conseils applicables aux réparations.
Durée de vie moyenne des différents types de joints
La longévité de vos joints dépend de plusieurs facteurs :
- Joints à la chaux aérienne : 15 à 25 ans selon l’exposition
- Joints à la chaux hydraulique : 25 à 40 ans dans des conditions normales
- Joints en mortier bâtard : 20 à 30 ans selon le dosage
- Joints en ciment pur : peuvent durer longtemps mais endommagent souvent la pierre
Ces durées sont indicatives et varient considérablement selon l’exposition du mur, la qualité d’exécution et l’entretien régulier.
Cas particuliers de rejointoiement
Certaines situations nécessitent des approches spécifiques pour le rejointoiement mur pierre.
Rejointoiement des murs humides ou salpêtrés
Face à des problèmes d’humidité dans les murs en pierre :
- Identifiez et traitez d’abord la source d’humidité (drainage, étanchéité, ventilation)
- Laissez sécher le mur autant que possible avant d’intervenir
- Utilisez un mortier de chaux hydraulique NHL 3.5 ou 5 selon le degré d’humidité
- Envisagez l’ajout de pouzzolane (15-20%) pour améliorer la résistance à l’humidité
- Prévoyez des joints légèrement en creux pour favoriser l’évaporation
Dans les cas extrêmes, un traitement préalable contre le salpêtre peut être nécessaire avant le rejointoiement.
Rejointoiement des murs patrimoniaux ou historiques
Pour les bâtisses de caractère ou classées :
- Documentez-vous sur les techniques et matériaux d’origine
- Prélevez si possible un échantillon du mortier ancien pour analyse
- Utilisez exclusivement des matériaux traditionnels (chaux aérienne, sables locaux)
- Respectez scrupuleusement l’aspect et la finition d’origine
- Consultez un spécialiste du patrimoine bâti pour les cas complexes
Pour les bâtiments classés, des autorisations préalables sont généralement requises avant toute intervention.
Rejointoiement décoratif et joints colorés
Pour un aspect esthétique personnalisé :
- Utilisez des sables colorés naturels (ocres, terres) pour une teinte authentique
- Ajoutez des pigments minéraux naturels (5 à 10% maximum du poids de la chaux)
- Testez toujours votre mélange sur une petite surface avant de l’appliquer à l’ensemble du mur
- Prévoyez que la teinte s’éclaircira en séchant (d’environ 30%)
- Envisagez différentes finitions décoratives (joints beurrés, joints en relief, etc.)
L’ajout de paillettes de mica peut créer un effet scintillant subtil, particulièrement apprécié pour les murs intérieurs.
Conclusion et conseils finaux
Le rejointoiement d’un mur en pierre est un art qui allie technique, patience et respect des matériaux traditionnels. En suivant méthodiquement les étapes décrites dans ce guide, vous pourrez réaliser un travail de qualité professionnelle qui mettra en valeur votre patrimoine bâti tout en le préservant durablement.
Rappelez-vous que la clé d’un rejointoiement réussi réside dans :
- Une préparation minutieuse du support
- Le choix d’un mortier adapté à votre type de pierre
- Une application soignée et patiente
- Un temps de cure respecté
- Un entretien régulier
N’hésitez pas à vous former auprès d’artisans expérimentés ou à participer à des stages de maçonnerie traditionnelle pour perfectionner votre technique. Le rejointoiement est une compétence qui s’acquiert progressivement et qui vous sera utile tout au long de la vie de votre bâtisse en pierre.
Comme nous le disons en Provence : « La pierre est patiente, elle attend toujours le bon artisan. » Prenez votre temps, respectez les matériaux, et votre mur vous le rendra au centuple par sa beauté et sa longévité.
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